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Echanger des idées et des moyens d'actions pour préparer l'avenir des sociétés humaines. Importance de l'éducation et de la coopération pour que l'homme se débarrasse de sa bestialité primitive.

Spectateur

Publié le 4 Décembre 2006 par Barco in Actualité

Je suis spectateur,

depuis toujours. Spectateur de la vie des gens qui m’entourent. Spectateur de ma propre vie. Je ne suis jamais parvenu, il me semble, à sortir de mon fauteuil. Je me sens loin de la vie, loin de l’existence. Plus le temps passe et plus la paralysie gagne du terrain. Le sentiment diffus, sourd, poisseux, de ne pouvoir rien y faire. Je suis là. Ma vie passe et moi je meurs. Mon désir s’étiole comme je m’éloigne de la réalité. Moins je vis, moins j’ai envie de vivre. L’ennui. Le vide. Je ne ressens que ça désormais. Je suis égaré. Loin, très loin des chemins de l’existence. Là où je me trouve, rien n’a de sens. L’obsolescence m’étouffe, m’efface progressivement. Rien ne me semble valoir le coup, pas même moi. Les gens le sentent et me le font sentir. Pourtant, je ne me sens plus seul. J’ai dépassé tout ça. Aujourd’hui je ne comprend même pas comment on pourrai vouloir de ma compagnie. Je ne suis plus amer, je suis anesthésié. Abruti d’incertitudes, d’angoisses morbides, résigné à l’abandon dont je fait l’objet, je regarde s’éloigner doucement ces proches qui autrefois étaient mes amis et qui aujourd’hui ne sont plus que des ombres diffuses. Tant de fois j’ai souhaité que les gens me rejoignent, car, si j’en suis là, c’est pour une raison simple finalement. Je suis tristement prétentieux. Je pense fondamentalement, depuis ma position reculée, pouvoir comprendre le monde. Je juge, j’analyse. Moi qui ne vis pas, je me paie ce luxe. Au prix de cette inadaptation existentielle, j’ai intériorisé l’idée selon laquelle, il faut, pour avoir une vision critique sur la vie, ne pas se compromettre avec celle-ci. Je regarde les gens faire semblant, se mentir à eux même. Cependant, ce n’est même pas un plaisir. Je ne peux le partager avec personne. Les gens que j’ai pu, durant mon adolescence, entraîner quelques temps avec moi dans cette spirale sordide, ont toujours fini par s’en dégager vivement. Aujourd’hui je n’essaie plus. Je tente de préserver au mieux ma famille, mon amie et mes quelques « encore » proches. Oui, tout cela est destructeur et néfaste. On ne peut vivre sans illusions. La vie m’en a toujours privé, c’est pour cela que je suis ainsi. J’ai tout d’abord pensé être le seul à être normal. Je pensais devoir ouvrir les yeux aux autres. Mais je n’ai fais que faire souffrir et tourner en rond. Je rend les gens comme moi. A mon contact ils deviennent malheureux. Ils perdent progressivement désir et joie de vivre. Ils perdent le cours de leur vie, le sens de la marche. Je suis nocif. Un champ électromagnétique qui brouille leurs boussoles internes. Je ne tire que tristesse à voir les gens se perdre ainsi. J’ai donc fait le constat que, c’était normal, les gens me fuiraient toujours. Pourtant, je voudrais les avoir près de moi. Je reste humain. Je conserve ce désir inaltérable, cette soif de chaleur humaine. Mais il m’est impossible de l’assouvir. En cela je suis triste malgré tout. Je comprend l’éloignement, n’en veux à personne, l’esseulement ne me gêne pas socialement. Il me ronge humainement. Et j’ai peur de ça. Parfois, je me vois vampire, poussé vers les autres par cet irrépressible besoin d’une humanité, que je suis incapable de vivre sans détruire la personne. On ne peut pas vivre comme je vis, je le vois sur les autres. Avant et après moi… Je ne comprend même pas comment je supporte ce poids. Il m’arrive souvent de penser à disparaître pour en finir avec cette souffrance intrinsèque avec laquelle j’ai été livré à la naissance. Cette inutile lucidité, froide, implacable, comme le flash d’un appareil photo qui n’épargne rien au sujet sur lequel le photographe jette son dévolu. Mais étrangement, je n’ai pas envie de mourir. Ma mélancolie reste tout à fait supportable. Je resterais néfaste pour moi et mes semblables. Le serpent se mort la queue.

 

Malgré ma lucidité sur mon funeste tempérament, je garde le fantasme d’une réunion de famille, grand moment de pathétique comédie humaine, où je pourrais demander, pour une bonne raison (si j’étais à l’article de la mort par exemple) à tous de cesser de tricher. Exposer cette scène à mon flash révélateur de la médiocrité et de la mesquinerie de la réalité. Toute cette convenance, cette hypocrisie bien comprise, ces rancunes étouffées. Que tous se mettent à table et avouent leurs griefs, leurs doutes et leur profonde vision des gens et des choses. Oui, à ce moment là, je pense que mes proches m’ayant rejoint dans la clarté, ne serait-ce que le temps d’un repas, je me sentirais moins seul. Il est clair que cette lucidité dont je me targue et qui gâche ma vie est simplement liée à un monstrueux complexe de supériorité. Quelle tristesse. La psychologie, la connaissance en général, gâche la magie. Je n’aurais pas pu être une sorte d’élu, un martyre choisi pour souffrir pour les autres ? Non, rien n’est entier, mystérieux, tous s’explique. Ce monde savant fabrique de grands enfants désenchantés comme moi. Frustré que je suis de ne pouvoir exercer mon sentiment de toute puissance dans un imaginaire ramené au statut de lubie, de pensée excentrique ou névrotique par une science omniprésente. Fatalement, j’exerce ce pouvoir sur la réalité puisque je ne peut plus rêver sans savoir que je rêve. Pour être tout puissant, ici, dans le réel, je suis obligé de rester dans mon rôle d’observateur (j’aurais pu choisir de vivre selon la loi du plus fort, celle des western, des caïds ; je n’en ai pas eu le courage). Oui, je pense que je ne suis pas seul dans ce cas, même si chez moi cette logique est poussée à l’extrême. C’est un mal actuel, la science m’a appris que ma vie ne sert à rien et ne va nulle part. Je ne m’en suis jamais remis.

Romain.

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B
Hé hé, non je ne parlais pas d'une abêtissement. Simplement d'une vision plus sereine, posée de l'existence. Tu attaches finalement moins d'importance au non sens de la vie. Tu vis tout bonnement.. peut être aussi parce que tu sens plus que tu vas mourir un jour de façon plus évidente. Du coup, même si tout ça te parait à la con tu veux plus laisser se consommer ton inutile "forfait" de vie..
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R
Perso, j'ai pas envie de voir le temps me simplifier l'esprit... Enfin ça dépend ce que t'entends par là
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B
C'est marrent, comme quoi, tu vois, ça se confirme... c'est le temps
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R
Tu vas rire un instant .. j'ai 23ans.
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B
Je pense que c'est l'expérience due à l'age et au temps qui nous bonifie et nous simplifie l'esprit. J'avais 23 ans quand j'ai ecris ça j'en ai 27 aujourd'hui. Quel age as tu ?
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